Archives de catégorie : Infos & communiqués

Lettre de l’antifasciste Maja devant ses juges hongrois

Nous relayons ici l’article Affaire « Budapest » paru sur Lundimatin le 14 mars 2025. Free Maja, Free Gino, Free Louna !

Affaire « Budapest »

Lettre de l’antifasciste Maja devant ses juges hongrois #LibérezGino

paru dans lundimatin#466, le 14 mars 2025

Alors que nous nous apprêtons à savoir si les juges français vont livrer Rexhino « Gino » Abazaj à la Hongrie (voir nos articles ici et ), nous publions cette lettre de Maja devant ses juges. Elle est incarcérée depuis 14 mois dans les prisons hongroises, placée à l’isolement, réveillée toutes les deux heures. Le 21 février dernier, elle comparaissait devant un tribunal de Budapest pour refuser le plaider coupable qui lui était proposé en échange d’une peine de 14 ans de prison, pour être soupçonnée, rappelons-le, d’avoir secoué quelques militants néo-nazis. Voici la traduction de sa lettre lue à ses juges.

 

Oui, j’ai quelque chose à dire, je voudrais parler avec vous qui représentez l’État hongrois et ses citoyennes et qui êtes en mesure de juger en leur nom. Ainsi qu’à tous les gens qui m’écoutent. Je sais que je ne suis pas seule ici aujourd’hui et cela me remplit d’une profonde gratitude.

Avec le plus grand respect, car je ne suis pas lea seule accusée dans ce procès. La répression ayant une continuité oppressante. Mais ce que je lis aujourd’hui ne vaut que pour moi, tout le reste pourrait sembler présomptueux.

Il y a une chose que je peux dire avec certitude : je ne serais pas ici aujourd’hui si je ne connaissais pas de nombreux cœurs brûlants d’humanité et de solidarité.
Me voici donc, enchaînée et accusée dans un pays pour lequel moi Maja, en tant qu’être humain non-binaire, je n’existe pas.

C’est un État qui exclut ouvertement les gens en raison de leur sexualité ou de leur genre.
Je suis accusée par un État européen parce que je suis antifasciste.

A part cela, j’ai décidé de m’exprimer car si je suis ici aujourd’hui, c’est parce qu’il y a huit mois, j’ai été kidnappée en violation de la loi. J’ai été extradée ici depuis l’Allemagne. J’ai été extradée ici par un pays dont la constitution promettait de respecter et de protéger ma dignité. Un pays dont les prétendus organes constitutionnels ont contourné le plus haut tribunal d’Allemagne, sachant qu’ils agissaient alors illégalement et que j’étais menacée ici. Ils m’ont amenée dans un pays dont l’engagement en faveur des droits de l’homme et des principes démocratiques s’estompe déjà sur le papier et dont les prisons sont pleines de gens qui osent défendre l’autodétermination de tous les peuples et osent promettre “plus jamais le fascisme “.

J’ai conscience d’être ici parce que ma naissance comportait en elle une promesse avec laquelle j’ai grandi. La promesse d’être un être humain. Celle-ci n’a pas grandi seule : jamais complètement libre, privilégiée mais pleine de souffrance, mais toujours à la recherche du moyen de la réaliser. Pour que ne se reproduise pas ce que, pas même un diable, ne peut accomplir.

Seul l’homme était, et est, capable d’être cette créature. C’est pourquoi, aujourd’hui encore, il crée des structures étatiques totalitaires, oppressives et destructrices, motivées par la haine et l’envie ; fuyant l’imperfection. L’homme a créé l’Holocauste et plus d’atrocités que le ciel ne compte d’étoiles, sans jamais toutefois perdre l’espoir d’un avenir de paix.

Je suis accusée par une magistrature qui prétend reconnaître en moi une haine enflammée, alors qu’elle considère celles et ceux qui glorifient les crimes de l’Holocauste et leurs auteurs comme une minorité à protéger. Il est donc essentiel de préciser que le Bureau du Procureur affirme que j’ai agressé physiquement des personnes venues dans cette ville il y a deux ans pour participer aux « Journées de l’honneur » [1]

Ce sont des journées de manifestations, de marches et de concerts qui font office de rendez-vous international pour les extrémistes de droite, légitimées et promues par les acteurs étatiques. Là, des gens se rassemblent pour vénérer fièrement et ouvertement les rues et les lieux autrefois parcourus par les fascistes allemands et hongrois. Des fascistes allemands et hongrois qui ont choisi de fuir leurs responsabilités d’assassins.

Ils font la fête lors de concerts de groupes musicaux profondément racistes et antisémites qui incitent à la haine et à la violence et donnent de l’argent à des réseaux terroristes de droite tels que « Sang et Honneur ».

Et maintenant, nous sommes réunies ici pour préparer un procès pour lequel j’ai déjà été condamnée, pour lequel la détention est déjà l’exécution d’une peine. Comme cela l’est pour moi. Depuis huit mois, je suis confrontée à des conditions de détention qui violent les garanties de la Hongrie.

Ni les “Règles pénitentiaires européennes“ ni les “Règles Nelson Mandela“ des Nations Unies ne sont respectées. Cela s’est concrétisé en me soumettant à un isolement continu et prolongé. En particulier moins de 30 minutes de contact humain par jour, pendant plus de 200 jours. Il s’agit d’une détention préventive où je ne suis pas autorisée à étudier, je n’ai pas le droit de travailler, je n’ai pas reçu suffisamment de livres, je n’ai pas reçu les suppléments de vitamines nécessaires ou les visites médicales en temps nécessaire. Il n’y a pas suffisamment de lumière et de nourriture saine. Je suis détenu.e dans une prison qui impose des mesures de sécurité humiliantes et dégradantes qui ne se justifient et ne s’expliquent en rien. Lorsqu’on leur demande pourquoi, iels restent silencieuses. J’ai ainsi dû porter des menottes, même dans ma cellule, lors de visites officielles ou d’appels Skype.
Plusieurs dizaines de personnes m’obligeaient à me déshabiller devant eux et je n’osais plus déshabiller dans ma propre cellule par honte, car une caméra y était accrochée illégalement depuis trois mois. Les punaises de lit et les cafards sont encore présents aujourd’hui, tout comme la lumière des contrôles horaires qui m’empêchent de dormir la nuit. Un sommeil dans lequel je rêve de pouvoir enfin serrer dans mes bras ma famille. Des personnes avec lesquelles je n’avais même pas le droit de faire le deuil et que j’avais le droit de voir uniquement derrière des plaques de plexiglas, deux heures par mois seulement.

Je suis ici aujourd’hui et je souffre déjà de dommages physiques et mentaux. Ma vision s’estompe et mon corps est épuisé. La prison m’oblige à me parler toute seule en m’interdisant un contact suffisant avec mes compagnes et compagnons de détention en raison de mon identité queer. Le seul but est de me punir et de m’empêcher d’être vivante.

Ce n’est pas seulement le système judiciaire hongrois qui est responsable de tout cela, mais aussi, contrairement à ce qu’ils prétendent, tous les tribunaux qui ont prolongé ma détention. La dernière fois, ils l’ont prolongée pour les prochaines années ou jusqu’au terme de ce procès.
Les raisons pour lesquelles je suis assise seule sur le banc des accusées aujourd’hui sont que la magistrature hongroise a désormais perdu toute crédibilité et que des tribunaux européens se refusent donc de coopérer avec elle. Ce qui est la chose juste à faire dans de telles circonstances.

Ce procès contre moi aurait également dû avoir lieu en Allemagne, avec toustes les autres accusées, là où j’aurais pu me préparer et me défendre. J’espère que tout ceci prendra finalement fin et que je pourrai me préparer à un procès sur un même pied d’égalité. Ne plus être privée d’opportunités de développement personnel et que je ne serai plus condamnée à une détention inhumaine à l’isolement qui laisse derrière elle des dommages à long terme qui sont déjà en train d’entamer mes forces.

Ce ne sont pas seulement mes conditions de détention qui sont à dénoncer, mais aussi le fait qu’il n’y a pas de risque objectif d’évasion ou de récidive.
Je n’ai jamais été informée par les autorités allemandes ou hongroises du mandat d’arrêt émis un mois avant mon arrestation et je n’ai jamais manifesté la moindre intention d’échapper à un quelconque procès.

Je voudrais souligner que je suis censé.e me défendre contre de prétendues preuves que je n’ai pas été autorisée à voir.

Aujourd’hui encore je n’ai pas accès à l’intégralité du dossier. Je devrais me défendre d’un acte d’accusation dont les montagnes de documents ne me sont pas traduits. Dont la plupart ne m’ont été remis qu’en hongrois. J’aurais dû me préparer alors que mes avocats étaient refoulés à plusieurs reprises à la porte de la prison. Des avocats qui n’avaient pas le droit de me montrer les dossiers et qui attendent désormais de moi que je commente un acte d’accusation qui n’est basé que sur de simples hypothèses… ! Dans lequel je ne trouve pas un seul mot qui décrit ma vie, ma personnalité et qui soit basé sur des faits. Qui n’explique pas plus sur quelle base est née l’accusation de faire partie d’une organisation criminelle.

Vous vous attendez vraiment à ce que je considère ces accusations justifiées ? Que je les avoue et que je me fasse ensuite enfermer derrière les barreaux pour toute la période d’une jeunesse à peine débutée ? Pendant 14 ans dans le régime carcéral le plus sévère, sans possibilité de libération conditionnelle, seulement pour vous épargner l’embarras de voir s’effondrer vos fragiles condamnations par manque de crédibilité ?

Cher procureur, soyez honnête, vous n’espérez tout de même pas que l’isolement me face mourir de faim et me force à accepter une condamnation sans procès ?

Vous rendez-vous compte que j’ai déjà été emprisonnée durant 14 mois, privée de ma vie antérieure depuis le 11 décembre 2023, privée de la possibilité de commencer mes études et de poursuivre mon travail, privée de ma famille, privée de la possibilité de la soutenir et de participer à une société à laquelle je veux contribuer ? Privée du besoin de me développer et de m’épanouir en tant qu’être humain. Tout cela m’a été retiré dans le but de me détruire en tant que personne politique. Mais j’ai toujours les mots que j’écris et je parle. Et je ne cesserai de le faire aussi longtemps que j’existerai et que je penserai.

Ainsi, j’ai aussi rédigé un acte d’accusation qui raconte ce que j’ai vécu l’année dernière. Cela m’a aidée à supporter les blessures. Son contenu se retrouve en partie dans ce que je présente ici.
Je garde le silence sur les détails angoissants car, aujourd’hui et dans ce procès, il s’agit de bien plus que de moi-même.

Il s’agit en effet de comprendre dans quel type de société nous voulons vivre et si nous pouvons accepter une action gouvernementale qui contredit nos valeurs morales. Je ne suis pas chez moi dans ce pays et je n’ai pas réussi à apprendre sa langue. Mais je sais ce qu’il fait à ses citoyenes. J’ai entendu dire comment il traite les gens sans défense et à sa merci.

Oui, j’ai entendu les hurlements et les coups venant des autres cellules, les lamentations et les pleurs, la colère et le désespoir qui, avec le temps, perdent toute mélodie humaine. J’ai vu des regards perdus et effrayés. J’ai entendu des paroles méprisantes qui naissent lorsque des gens créent des systèmes et des lieux où ils cherchent à supprimer le libre-arbitre de certain.e.s pour créer et renforcer le pouvoir d’autres avec des paroles de jugement et des actions punitives.

J’ai vu les prisons en Allemagne et en Hongrie et je voudrais dire qu’ici les gens sont privés de leur dignité, indépendamment qu’ils soient surveillés ou non. Je ne peux pas avoir la présomption de juger les gens que j’ai rencontrés là-bas, je sais seulement que la société est en train de faillir.

Consciente de cela, je ne peux nier les moments où je suis assis au bureau de ma cellule et où il me semble impossible de garder avec moi la beauté du monde. Mon esprit se limite à suivre la souffrance de mes codétenues, interrompue par le surgissement de mes propres blessures.

Mon esprit s’évade de l’impuissance, se perd dans le sentiment d’impuissance, arraché à mon corps, arraché à hier et à demain. Je ne vois alors que ce qui semble inaccessible, mais d’où germe pour moi l’humanité. L’héritage de la recherche d’un terrain d’entente avec l’autre sans juger l’être humain pour son être, son corps et ses capacités. Essayer de créer ensemble quelque chose de valeur. Sans exploiter ni opprimer, en sachant pardonner les échecs, sans se taire et enfin en s’émerveillant que, de tout cela, germe la foi en un lendemain proche et paisible.

Mais les larmes de douleur s’estompent, plus tard, quand je lis vos lettres, quand le journal me parle du monde et que j’apprends que des utopies sont préservées par des gens. Des gens que des valeurs morales évidentes n’ont pas abandonnés. Qui sont prêts à les défendre et à les créer, qui ne peuvent détourner le regard de celles et ceux qui commettent des atrocités. Qui recherchent l’imperfection humaine, qui ne paralyse ni ne brutalise et qui vivent, au contraire, dans une tentative de créativité et de solidarité, cherchant une issue à la violence motivée par le pouvoir, l’avidité et la complaisance.
J’admire chaque personne ordinaire qui essaie de saisir la complexité de notre monde et agit là où cela semble humainement possible.

Je veux partager le chemin avec celles et ceux qui doutent, sans brader leur propre moralité et tendresse contre des promesses trompeuses de bonheur individuel. Je respecte toutes celles et ceux qui tentent de comprendre l’humanité comme un tout unique et parviennent à ne pas perdre de vue la singularité de chaque personne, née de ce qu’elles ont vécu.

Ce n’est pas une existence parfaite, non, on échoue parfois. Nous ne pouvons pas échapper à nous-mêmes ni au monde. Mais nous sommes capables d’agir, nous pouvons apprendre à faire confiance aux uns et aux autres ainsi qu’à nous-mêmes. Nous sommes capables de grandir au-delà de nous-même lorsque nous cherchons à comprendre, comprendre et décider à partir de l’impulsion de l’humanité. Nous sommes capables d’aider là où il y a un incendie, où il manque de la protection et que les personnes fuient. Nous pouvons partager et rester là où la douleur et la souffrance sont plus fortes, sachant toujours que nous ne sommes pas seules.

Maintenant, moi-même, je ne peux pas empêcher que mes yeux me fassent de plus en plus mal, qu’ils se ferment à cause de la fatigue et que mes sens se perdent.

Mais, même avec les paupières fermées, je ne peux échapper au fait que la guerre, la faim, la destruction de l’environnement et le partage injuste des ressources continuent de créer des réalités douloureuses. Une guerre d’agression fait toujours rage en Europe et il est impossible d’ignorer le fait que le fascisme et ses adeptes reprennent racine. A la fois sur un continent apparemment lointain et dans le jardin d’à côté. Les désirs totalitaires et les complots autoritaires dans nos sociétés, la marginalisation et l’isolement connaissent une renaissance. Je me demande ce qui se passerait si tout le monde se sauvait individuellement. Est-ce ainsi que nous échappons à notre impuissance collective ? Ou si nous nous laissons guider par la peur et le désespoir.

Au cours des dernières semaines, j’ai expérimenté personnellement comment ces ressentis peuvent paralyser mon esprit et mon corps, comment ils m’ont poussé à abandonner mes espoirs et à m’éloigner de la vie. Mais c’est alors que j’ai vu apparaitre une plante douce dans un endroit où le soleil n’était pas apparu depuis des mois, en sachant que l’hiver allait passer. À ses côtés, j’ai dû admettre que – aussi infernal que soit cet endroit sur terre – les fleurs peuvent y pousser, dans les fissures des murs ou dans mon être.

Pas besoin de beaucoup. D’abord la conviction que le courage et la confiance créent de grandes choses à partir de petites choses. Car d’elles naît la résilience dans l’attente de jours meilleurs. Jours durant lesquels nous expérimentons que chacune de nos actions détermine ce qui se ramifie devant et fleurit dans notre jardin à l’approche des premiers jours du printemps.

Souvent, je ne sais pas comment, je sais seulement qu’il est nécessaire d’oser. Et, si on est honnête, on réalise que cela est possible en rencontrant des inconnus comme nous.
Aujourd’hui, j’ai vu certains de vos visages, j’ai lu vos rêves, j’ai pu partager des moments de vie, ressentir de la solidarité. Vous admirer et vous envier alors que vous luttez pour une humanité qui résiste, dépasse les frontières rouillées de la parole et de la pensée et se déploie dans l’être queer, dans l’amour, dans l’auto-émancipation féministe d’une humanité sans frontières. Ainsi que dans toutes les luttes émancipatrices pour la justice entre toutes les personnes.

Mon temps de parole se terminera bientôt pour aujourd’hui, si nécessaire je me contredirai, surtout s’ils continuent à m’enchaîner, à m’enfermer et à essayer de briser ma dignité par la force.
Car oui, aujourd’hui se pose encore la question d’une procédure constitutionnelle. De la question de comment il est possible que je sois exposée à ces conditions de détention et qu’on cherche à me punir de cette manière humiliante et offensante.

Cependant, ce n’est pas entre mes mains que réside la capacité de changer la situation.
Les autorités allemandes m’ont extradée ne respectant pas leur plus haute juridiction. La Hongrie viole les garanties et le droit européen, démontrant une fois de plus à quel point elle s’éloigne des prétendues valeurs démocratiques. Il ne me reste plus qu’à dénoncer tout cela, à m’y opposer et à faire appel à tout le monde pour en faire de même. Je sais que mon expérience n’est pas unique et j’espère donc que mes paroles parviennent également à toutes celles et ceux qui sont persécutées et emprisonné.e.s pour s’être opposées à l’extrémisme de droite, au fascisme, au patriarcat, à l’exploitation de la nature et des personnes, à la violence structurelles et racistes et à la répression. Pour avoir créé des alternatives pour l’émancipation de l’existence queer et pour une vie digne pour toustes.

Et à toustes les autres, je tiens à exprimer ma sincère gratitude d’avoir pris le temps de m’écouter.

Maja

[1Rassemblement fasciste qui célèbre chaque année la défaite de l’armée Rouge face aux nazis.

 

Louna est sortie de prison ! (mais n’est toujours pas libre)

Bonne nouvelle ! Louna est sortie de prison ce vendredi 14/02 !

Le 3 février, lorsque le juge des libertés et de la détention (JLD) avait décidé du renouvellement de sa détention jusqu’à juin, il mettait notamment en avant le fait que Louna n’avait pas encore été entendue par la juge d’instruction (Après 4 mois de détention, merci la lenteur de la justice…). L’entretien avec la juge d’instruction a eu lieu la semaine suivante et les avocates de Louna ont déposé une Demande de Mise en Liberté (DML) dans la foulée. C’est à l’issue de cette DML qu’elle a été libérée, sous Contrôle Judiciaire (CJ).

Lors de l’entretien devant la juge d’instruction, Louna a revendiqué son geste. Elle a déclaré : « Je reconnais avoir fait une tentative de dégradation d’un engin de chantier. Par contre, je ne m’excuserai pas, car je considère qu’il s’agit d’un acte de légitime défense écologiste. On se rappelle que dans les années 40, les Résistant.es étaient qualifié.es de terroriste : je me demande comment on sera qualifié.es plus tard… »

La juge d’instruction a ensuite tenté de faire coopérer Louna à l’enquête et qu’elle donne des informations sur d’autres personnes, mais elle a gardé le silence. La juge lui a carrément déclaré : « Loin de moi l’idée de faire du chantage à la détention, mais le temps d’enquête est long et il pourrait être écourté si vous donniez plus d’informations »… Non, vraiment ça ressemble pas du tout à du chantage à la détention… Mais ça n’a pas marché pour lui soutirer des infos (non non on poucave pas) et elle est quand même sortie une semaine après !

L’affaire n’est pas finie, Louna n’est plus en détention, mais elle reste soumise à un contrôle judiciaire strict : obligation d’être chaque nuit à son domicile, un pointage au comico par semaine, interdiction de quitter le département et celui limitrophe et surtout une interdiction de contact avec des personnes proches…

Nous vous tiendrons au courant de la suite, du probable procès, ou des rebondissements de l’enquête, toujours en cours. Y aura toujours besoin de soutien !

Nous tenons à remercier toutes les personnes qui ont apporté et apportent du soutien, avec vos lettres, vos actions diverses, votre présence aux rassos, votre aide logistique, vos dons, etc <3

On est bien content.es que Louna ne soit plus en prison, mais ça reste une institution nulle à chier qui continue d’enfermer les personnes pauvres, racisées, avec des troubles psy ou dissidentes. On continue de lutter contre toutes les prisons et les projets mortifères !

Free Louna !

No Macadam !

Crève la taule !

Le collectif de soutien à Louna

soutienlouna.noblogs.org

Rassemblement de soutien à Louna – Tribunal judiciaire de Toulouse 03/02

📢 RASSEMBLEMENT DE SOUTIEN À LOUNA 📢
lundi 3 février à 9h30 devant le tribunal judiciaire de Toulouse

Cela fait déjà 3 mois et demi que notre camarade Louna est en détention provisoire à Tarbes suite à sa mise en examen dans une enquête d’instruction pour la lutte contre l’A69. Elle est accusée de la destruction d’une pelleteuse par substance explosive avec participation à une association de malfaiteur 🔥

Pour le moment aucune date de procès n’est connue, ce qui laisse la possibilité à la justice de la laisser en détention provisoire pour encore de nombreux mois.

Ce lundi 3 février, Louna passera devant un.e juge des libertés et de la détention (JLD) au tribunal de Toulouse pour décider de la prolongation ou non de sa détention provisoire pour une nouvelle durée de 4 mois.

💥 Venez nombreux.ses devant le tribunal pour montrer à la justice que Louna n’est pas seule et que nous n’acceptons pas cette situation d’isolement, tout comme nous n’acceptons aucune forme d’enfermement !

🗯️ Louna ne souhaite pas qu’il y ait du monde à l’audience, on vous invitera donc à rester devant le tribunal en soutien. Merci de respecter sa volonté ☺️

Pour rappel, Louna est enfermée à la Maison d’arrêt pour hommes de Tarbes, alors que c’est une meuf trans. Et parce qu’elle est une meuf trans, elle est mise dans une cellule à l’isolement.
La juge qui avait décidé de son placement à Tarbes avait justifié ce choix par l’existence d’un accueil spécial pour les personnes trans là-bas : c’est absolument FAUX, rien de particulier n’est mis en place.

💥 Pour plus d’info sur la situation de Louna, on vous renvoi vers les 2 précédents communiqués dispos sur le site internet de soutien à Louna : https://soutienlouna.noblogs.org/post/category/infos/

🔥 Free Louna !
🔥 No Macadam !
🔥 Crève la taule !

Collectif de soutien à Louna
soutien-louna@riseup.net

Free Louna !

Free Louna ! Des nouvelles de l’affaire de Louna, meuf trans anar incarcérée dans le cadre de la lutte contre l’A69

Cela fait désormais plus de 3 mois que Louna, meuf trans anarchiste en lutte contre l’A69, est maintenue en détention provisoire au sein de la maison d’arrêt pour hommes de Tarbes, à l’isolement. Malgré cet enfermement qui commence à durer et les conditions d’une incarcération à l’isolement, elle garde le moral, et nous on garde la rage de la savoir enfermée. Louna est accusée d’avoir incendié un engin de chantier destiné à la construction de l’A69, projet d’autoroute aussi bien inutile que mortifère, entre Castres et Toulouse. Les demandes de libération, notamment sous contrôle judiciaire ou bracelet électronique, ont été refusées à ce jour.

On revient ici sur les raisons de son incarcération, avec les éléments qu’on a recueillis suite aux autres GAV et lors d’une audience publique, ou avec ce qu’on en interprète, mais aussi sur les moyens de la soutenir.  La prochaine échéance importante pour la libération de Louna arrive mi-février : le juge des libertés et de la détention devra statuer sur un renouvellement ou non de la détention provisoire. Diffusons largement le slogan « Free Louna », demandons sa libération et que crèvent les taules, la répression, et la transphobie d’État !

Les éléments de l’enquête

La nuit du 4 au 5 mai 2024, un engin de chantier a été incendié non loin du tracé de l’A69. D’après les enquêteurs, des images de vidéosurveillance sur place montrent deux personnes mettre le feu à une pelleteuse, puis l’une d’entre elle être victime d’un retour de flamme. Or, cette même nuit, une personne a été admise aux urgences dans un des hôpitaux les plus proches du lieu de l’incendie, présentant des blessures qui pourraient être compatibles avec l’accident filmé. Il s’agit ici de Louna, effectivement hospitalisée cette nuit-là.

D’après les images de vidéosurveillance de l’hôpital, trois personnes semblaient l’accompagner. Les enquêteurs ont repéré la voiture dans laquelle Louna serait arrivée en compagnie de ces trois personnes, ils en ont relevé la plaque d’immatriculation et donc l’identité de son.sa propriétaire. De plus, Louna a indiqué un numéro de téléphone d’un.e proche dans un formulaire des urgences, numéro que les flics semblent avoir attribué à un.e des accompagnateurs.rices. Des keufs sont également venus saisir ses vêtements durant son hospitalisation, et ont trouvé de l’ADN sur un short ainsi que sur un masque covid contenu dans une poche. Cet ADN a été attribué à une des personnes suspectée d’avoir accompagné Louna à l’hôpital. Lors de leur passage, les flics ont aussi pris des photos des accompagnateur.rices, de meilleure qualité que les images de vidéosurveillances car prises avec un smartphone. C’était probablement pour tenter ensuite de faire de la reconnaissance faciale, par exemple en comparant avec les photos du TAJ¹ ou les photos de militant.es de l’A69 issues de leur fichage incessant.

Après deux jours d’hospitalisation, Louna a décidé de partir d’elle-même.

Sur la base de ces éléments, quatre personnes ont été arrêtées mi-octobre : Louna, deux personnes soupçonnées de faire partie des accompagnateurs.rices, et le.a propriétaire de la voiture. Les gardes à vue ont duré jusqu’à 94 heures, les interrogatoires se sont enchaînés. Les enquêteurs ont également profité de cette garde à vue pour récupérer l’ADN de Louna sur un gobelet qu’elle a utilisé, en plus de l’avoir probablement déjà chopé sur ses vêtements à l’hôpital. Ils déclarent que cette même ADN a été retrouvée sur un masque covid resté sur le lieu de l’incendie. Suite à cela, Louna a été mise en examen dans le cadre de cette instruction et les trois autres personnes ont été relâchées. Les chefs d’inculpation retenus sont la destruction d’une pelleteuse par une substance explosive et la participation à une association de malfaiteur en vue d’une destruction par voie dangereuse.

Mi-novembre, les enquêteurs ont procédé à une nouvelle perquisition et interpellation au domicile d’un.e militant.e, toujours à la recherche d’au moins un.e des accompagnateur.rices de l’hôpital. Ils ont fouillé son appartement à la recherche d’un arrosoir, car les vidéosurveillances de l’hôpital montreraient une personne qui sort de la voiture avec un arrosoir (planquez vos arrosoirs haha).
A priori, les keufs auraient visé cette personne par reconnaissance faciale, car elle serait connue par les services de police pour son activisme dans les milieux écolos de sa ville. Iel aussi a été relâché.e sans suites à ce jour.

Parmi les autres techniques que les keufs ont dit avoir utilisé ou que l’on suppose, ils auraient mis un.e ou plusieurs des suspect.es sur écoute pour les appels et SMS en clair et auraient suivi les déplacements d’un.e ou plusieurs personnes par bornage de son / leurs téléphones portables. Ils semblent aussi avoir demandé des relevés bancaires (y compris de proches des suspect.es), et puisqu’ils le font presque systématiquement, on peut imaginer qu’ils ont demandé les fadettes² du / des numéros qu’ils ont attribué à un.e / des suspect.es. Enfin, des parents de certain.es suspect.es ont été convoqué.es en audition pendant la garde à vue, dans le cas où iels avaient été désigné.es comme proche à prévenir par les gardé.es à vue.

Une autre enquête d’instruction a été ouverte mi-décembre dernier, avec la mise en garde à vue de trois personnes sur des interpellations ciblées allant jusqu’à 36h. L’enquête concernait plusieurs incendies d’engins de chantier, et les personnes interpellées ont été relâchées sans suite. Vu les nombreux incendies attribués aux militant.es contre l’A69, il y a très probablement encore d’autres instructions en cours sur d’autres faits. Pour se protéger collectivement contre la répression, il nous semble important de continuer de se former et se mettre à jour sur les techniques des keufs et les pratiques de défense collective :


Comment apporter du soutien

Louna est en taule depuis trois mois, à l’isolement dans une maison d’arrêt pour hommes, comme c’est courant pour les meufs trans incarcérées³. Elle a quelques visites, mais ses proches habitent à plusieurs centaines de kilomètres de Tarbes. Elle reçoit également de nombreuses lettres de soutien, qui lui font toujours très chaud au cœur. Pour obtenir les informations pour lui écrire, vous pouvez envoyer un mail à soutien-louna@riseup.net, car elle ne souhaite pas diffuser publiquement son état civil et numéro d’écrou.

Louna subit la répression d’un système judiciaire transphobe, qui protège les intérêts capitalistes des promoteurs de l’A69, projet d’autoroute dont l’aspect dévastateur est largement documenté ⁴. Les magistrats lui reprochent également de ne pas être assez insérée socialement, motif que cette justice classiste trouve suffisant pour placer quelqu’un.e en détention provisoire plutôt que sous contrôle judiciaire. On invite toustes les militant.es anticapitalistes, queer, écolo etc, à demander sa libération immédiate et partager très largement le mot : « Free Louna ! » Vous pouvez repartager ce communiqué ainsi que celui de novembre, les imprimer et les differ dans les lieux militants de votre ville, lors de manifs, faire des prises de paroles lors d’événements, créer des banderoles…
Vous pouvez également imprimer et sticker partout ce stickers Free Louna et en créer d’autres.

De manière générale, n’hésitez pas à prendre l’initiative de toute action de soutien qui vous parle. Nous rassemblons sur ce site toutes les informations liées à la situation de Louna. Vous pouvez mettre le lien sur les tracts, stickers, publications que vous diffusez et nous écrire suite à une action de soutien pour qu’on la partage sur le site si vous le souhaitez.

Enfin, vous pouvez apporter du soutien financier. Il y a déjà eu plusieurs événements de soutien à Louna (un énorme merci!!), grâce auxquels nous pouvons faire face aux frais de son incarcération pour le moment. Vous pouvez continuer d’en organiser, notamment si son incarcération se prolonge, ou également donner sur la cagnotte de l’antirep de l’A69, qui soutient Louna mais aussi de la centaine de procès en cours de militant.es de cette lutte, qui subissent une énorme répression.

Merci infiniment pour toute la solidarité qui est exprimée envers Louna, ça fait chaud au cœur ! Vous êtes incroyables !

On finit par quelques mots de Louna :

« Pour toutes les lettres de soutien à Louna, déjà merci pour la force <3 Y a une part de réconfort de voir autant de soutien entre mes mains. Comme dit une des lettres « les murs sont épais, mais la solidarité puissante ! » Tous ces petits et grands dessins, ces poèmes, ces anecdotes, ces mots d’amour, de tendresse, de rage, des câlins, des accolades, des clins d’œil… On est là ! Un merci particulier aux sœurs trans, on se sait, force !
Merci pour les soirées de soutien, les cantines et tout le reste.
Une pensée à celleux qui se deter ici et ailleurs, on est ensemble <3 Force à celleux qui construisent, qui soignent, qui restent <3 Amour et Rage
TranS RightS »

Free Louna !
No Macadam !
Crève la taule !

Collectif de soutien à Louna
soutien-louna@riseup.net
https://soutienlouna.noblogs.org


1. Le Traitement des Antécédents Judiciaires (TAJ) est un fichier de police judiciaire recensant des informations relatives aux victimes d’infractions et aux personnes mises en cause et prévenues dans le cadre d’enquêtes pénales. Outre l’infraction en cause, il contient des données en lien avec l’identité des personnes, mises en cause et victimes, notamment les informations sur leur état civil, leur adresse, leur profession ainsi que leur photographie.

2.Les factures détaillées (Fadettes) contiennent les métadonnées des échanges, sans leur contenu. Elles mentionnent notamment les numéros, dates, heures et durées de communication. Plus d’infos ici : https://infokiosques.net/spip.php?article1975 .

3. https://blogs.mediapart.fr/observatoire-international-des-prisons-section-francaise/blog/120117/personnes-trans-incarcerees-isolement-et-humiliations ou https://oip.org/analyse/femmes-trans-en-prison-ostracisees-et-discriminees/

4. https://www.francetvinfo.fr/economie/transports/enquete-conflit-d-interet-opacite-financiere-dans-les-coulisses-du-projet-controverse-de-l-a69_6495839.html ou https://reporterre.net/A69-Toulouse-Castres-un-avis-negatif-du-Rapporteur-public-relance-le-debat-sur-le-projet

 

 

 

 

[1er communiqué] Soutien à Louna, meuf trans anarchiste en détention provisoire dans le cadre de la lutte contre l’A69

Premier communiqué – novembre 2024

Mi-octobre dernier, 4 personnes se sont faites arrêtées dans plusieurs coins de France, dans la rue lors d’arrestations ciblées ou à leur domicile à 6h du mat. Iels ont chacun.e été conduites jusqu’à Toulouse pour y subir des Garde à Vue allant jusqu’à 94 heures, dans le cadre d’une instruction pour « association de malfaiteurs » liée à la lutte contre l’A69. A l’issue de sa garde à vue, Louna a été la seule personne mise en examen et a été envoyée en détention provisoire (DP). Elle est accusée d’avoir détruit une pelleteuse par substance explosive et d’association de malfaiteur en vue d’une destruction par voie dangereuse.

Depuis, elle est à la Maison d’arrêt pour hommes de Tarbes, alors que c’est une meuf trans. Et parce qu’elle est une meuf trans, elle est mise à « l’isolement ». Concrètement l’isolement, ça veut dire que sa seule et unique sociabilité c’est avec des matons et qu’elle ne peut sortir de sa cellule que lorsque l’ensemble des détenus sont dans les leurs. Ça rend son accès à la promenade, à la douche ou à d’éventuelles activités super galère, voire impossible. L’autre jour, elle a été oubliée à la douche pendant plus d’une heure et demie parce que chacun de ses déplacements demande « trop d’orga » aux matons. Elle subit la transphobie de la justice à toutes les échelles, entre les mégenrages constants et les questions intrusives d’une juge qui lui demande si elle veut faire une opération génitale et qui s’étonne de l’absence d’un suivi par un.e psychiatre pour sa transition… D’ailleurs, la juge qui a décidé du placement à Tarbes a argué qu’il y avait un accueil spécial pour les personnes trans là-bas : c’est absolument FAUX, c’est la seule meuf trans et bien sûr y a rien de particulier, c’est juste une maison d’arrêt pour hommes surpeuplée à 210%.

Continuer la lecture de [1er communiqué] Soutien à Louna, meuf trans anarchiste en détention provisoire dans le cadre de la lutte contre l’A69

Support for Louna, a trans girl in pre-trial detention as part of the fight against A69

Tarbes Prison: Support for Louna, a trans girl in pre-trial detention as part of the fight against A69

In mid-October, 4 people were arrested in several parts of France, on the street during targeted arrests or at their home at 6 am. Each was driven to Toulouse to undergo up to 94 hours in custody as part of an investigation for “association of malefactors” related to the struggle against the A69. After being held, Louna was the only person charged and sent to pre-trial detention (PD). She is accused of having destroyed an excavator with an explosive substance and criminal conspiracy with a view to destruction with dangerous means.

Since then, she has been held in Tarbes male prison. And because she is a trans girl, she has been put in “isolation”. In concrete terms, solitary confinement means that her one and only sociability is with screws and that she can only leave her cell when all the prisoners are in theirs. It makes access to walks, showers or possible activities super difficult, if not impossible. The other day, she was forgotten in the shower for more than an hour and a half because each of her trips requires “too much aggro” from the guards.

She is subjected to the transphobia of justice at all levels, between constant misogyny and intrusive questions from a judge who asks her if she wants to do a genital operation and who is surprised by the absence of follow-up by a psychiatrist for their transition… By the way, the judge who decided on the placement at Tarbes argued that there was a special welcome for trans people over there: it’s absolutely FALSE, she’s the only trans girl and of course there’s nothing special about it, it’s just a 210% overcrowded men’s prison.

Louna was therefore placed in pre-trial detention solely on charges of property damage, private property that must visibly belong to a company working on the highway, which the state insists is the firm’s advocate. At the public hearing, she is described as an “active opponent of the A69”, on the sole basis that she was seen feeding squirrels (name given to the activists occupying the trees), to have been checked once near the zad and to have been present at a trial of militants. Indeed, a dangerous eco-terrorist …

Continuer la lecture de Support for Louna, a trans girl in pre-trial detention as part of the fight against A69